31 janvier 2017 - Journée d'étude ASFC «Qingdao -Ombres & Lumières»
Les apports en nutrition et en physiologie digestive
lors du 11ème Congrès Mondial de Cuniculture de Qingdao - Chine, juin 2016

par

Thierry GIDENNE¹ et Paméla VASTEL²

¹ INRA Toulouse, UMR 1388 GenPhySE, CS 52627 - 31326 CASTANET-TOLOSAN
² Techna France Nutrition , BP 10 - 44220 COUËRON

INTRODUCTION

Figure 1 : Nombre de communications
Dans le recueil des communications, la section " Nutrition et physiologie de la digestion " compte 26 communications sur un total de 226. Elle représente donc environ 10% des travaux présentés lors de ce 11ème Congrès, soit environ moitié moins qu'en 2008 ou 2012.
Cependant dans cet article, nous avons choisi de reclasser les communications en fonction de leur contenu "réel". Ainsi, cette synthèse porte sur un total de 18 communications, pouvant se référer à d'autres sections.

En classant toutes les communications par nationalité du premier auteur, nous pouvons remarquer que la Chine (pays organisateur) arrive en tête du nombre de communications (n=9, figure 1). Assez peu de pays publient dans cette section, et contrairement aux précédents congrès, ni l'Italie ni l'Espagne n'ont communiqué dans cette discipline.

Outre une section physiologie générale, nous avons classé ces 18 communications selon les facteurs de contrôle sur la physiologie : effets d'additifs, effets de la conduite d'élevage (rationnement, lumière…), effets de nutriments, effets de la structure physique de l'aliment.

 

1 - LES APPORTS EN PHYSIOLOGIE GENERALE

Activité de l'amylase sérique chez les lapereaux allaités et les lapins sevrés, nourris avec différents régimes alimentaires

Comme pour les 3 précédents congrès, l'équipe Roumaine de Dojana (Bucarest) a présenté 2 communications: l'une portant sur les variations de profil d'enzymes sériques (B?l?ceanu et al., p265) et l'autre portant sur les variations de profil sanguin (B?l?ceanu et al., p261).

La première étude compare les concentrations en amylase, lipase et trypsine sérique chez des lapereaux de 22 jours d'âge (avant sevrage à 30j), puis chez des lapereaux à 1, 8 ou 15j après sevrage, sachant qu'après sevrage ils sont nourris avec un aliment témoin ou riche en protéines, ou riche en amidon, ou encore riche en fibres. L'activité spécifique de l'amylase était 3 fois plus élevée chez les lapins sevrés d'un jour que chez les lapereaux 8j avant sevrage (22j). De plus, elle est modifiée par le régime, en effet dès 8j après sevrage, le niveau d'amylase double, sauf pour le régime " amidon " où il se voit quadruplé. De même, alors que l'activité de l'amylase continue à augmenter à 15j, elle tend à diminuer lorsque le régime est enrichi en protéine.
L'activité de la lipase sérique était maximale chez les lapins allaités, puis très fortement réduite (10 à 6 fois) ensuite après le sevrage, sans effet du régime. L'activité de la trypsine sérique a doublé entre 22 jours et 45 jours d'aêge (15 j après sevrage), avec un léger effet favorable du régime riche en protéines.
Cette étude confirme que l'activité des enzymes est âge-dépendante, mais également liée à l'alimentation. Il reste à vérifier que ces variations de concentrations sériques sont corrélées aux concentrations dans la lumière intestinale et à l'efficacité de digestion ? Si c'est le cas, cela soulignerait l'importance de l'alimentation autour du sevrage, et notamment sur les aliments présevrage, qui sont en majorité des aliments faits pour améliorer la santé digestive, et donc riches en fibres (mais faibles en protéines et amidon). Ainsi, cela pourrait affecter le développement des enzymes et donc la valorisation des nutriments en engraissement.

 

 

La seconde étude (Balaceanu et al., p261), moins attrayante, analyse les variations de divers paramètres biochimiques sanguins en fonction de variations du ratio amidon/fibre de l'aliment. Par exemple, la glycémie et les taux de protéines ont été légèrement modifiés. L'urée semble en corrélation avec le niveau alimentaire de fibre et d'amidon. Les variations de triglycérides, HDL ou LDL ne sont pas corrélés au ratio amidon/fibre. Mais, la portée de ces résultats est très restreinte car les écarts, notamment en cellulose brute pour les régimes " fibres " sont peu différents, et les profils fibres "Van-Soest" ne sont pas fournis.

L'étude de Liu et al. (p303) traite de physiologie assez fondamentale. Les effets d'une injection intraveineuse d'acétate (0,5 mg/jour/kg de poids) ont été étudiés sur l'ingestion : baisse de l'ingéré dans les 5h suivant l'injection. Divers paramètres ont ensuite été analysés pour expliquer cette anorexie: les niveaux d'ARNm du neuropeptide Y hypothalamique (P=NS), ou les niveaux de protéine de p-ERK et de p-p38 MAPK (P=NS), ou la protéine kinases NH2-terminale phosphorylée (baisse, P<0,05). Ainsi, l'administration d'acétate induirait une anorexie en lien avec une augmentation de l'expression du gène POMC.

Le microbiote caecal a été étudié par des techniques de séquençage de l'ARNr16S (Deng et al., p27), sur un groupe de 43 lapins de 60 jours d'âge, afin d'évaluer la biodiversité de la flore. Au total, 19 621 signatures génétiques bactériennes (OTU) différentes ont été identifiées, et 42% d'entre elles sont partagées par un maximum de trois échantillons. Les auteurs concluent à une richesse microbienne (moyenne de Chao = 5971) et une diversité (moyenne de Shannon = 4,19) relativement élevées pour la flore caecale. On regrette que les auteurs n'aient pas présenté d'arbres phylogénétiques associés. Donc, malgré un séquençage assez profond, cette étude n'apporte pas de connaissances supplémentaires.

 

2 - EFFETS D'APPORT D'ADDITIFS

  Deux études ont été retenues dans cette section.
Les effets de l'addition de racine de chicorée (Volek et al., p467) à la ration quotidienne de lapins restreints comparés à un témoin alimenté librement ont été étudiés sur les performances et les paramètres fermentaires caecaux. Le problème principal est la confusion des effets du niveau d'ingestion et de l'addition de racine de chicorée (riche en inuline) qui rend difficile l'interprétation des résultats. Cependant, l'addition de racines de chicorée stimulerait l'activité fermentaire caecale (baisse de pH et hausse des AGV), qui pourrait permettre un meilleur contrôle sanitaire (notamment par la baisse de la morbidité), sans altérer les performances (poids, IC).

Les effets de l'addition d'un probiotique (Ren et al., p327) "Bacillus coagulans" a été étudié à 2 doses (250 and 300 mg/kg) et comparé à un témoin (sans additif), sur les performances (35-84j) et le pH de différents segments digestifs. Les résultats, obtenus à partir de 3 groupes de 50 lapins, indiquent une amélioration des performances (meilleur gain de poids et meilleur IC: 4,29 - 4,10 - 3,89 resp. pour témoin, 250 et 300mg) et une plus forte acidité dans l'intestin grêle et le caecum (P<0,05). On peut regretter l'absence de mesures d'état sanitaire. L'intérêt, si ces résultats sont confirmés, serait la mise sur le marché d'un nouveau probiotique à base de bactéries (et non de levures), car à ce jour, ces bactéries n'ont pas d'autorisation en tant qu'additif pour les lapins.

 

3 - EFFETS DE LA STRUCTURE PHYSIQUE DE L'ALIMENT

Répartition de la taille de particules de luzerne en fonction du type de broyage
* tamisage humide ** boite à secousses

Deux études se sont intéressées aux effets de paramètres physiques de l'aliment, ce qui est assez original. Ainsi, l'étude de Lang et al. (p 289) a comparé les effets, sur plusieurs paramètres physiologique, de foin de luzerne avec 3 structures différentes : haché, granulé, broyé.

Les lapins nourris avec du foin de luzerne haché ont une teneur en matière sèche (P <0,01) du chyme caecal (13,9%) inférieure à celle du groupe nourri avec la luzerne broyée (17,5%) ou granulée (20,0%). Le temps d'ingestion de l'aliment est jusqu'à 5 fois plus rapide pour les aliments granulé. Les lapins nourris avec du foin haché ont plus de grandes particules dans l'estomac (80% à 57% granulé, 54% broyé). Ces résultats confirment l'effet de la granulométrie sur la physiologie digestive du lapin. Des études complémentaires sevraient évaluer l'effet sur les performances et la santé.

Li et al. (p. 427) ont comparé l'impact de différents fourrages grossiers sur la morphologie intestinale de lapins Rex à partir de 45j d'âge. Ils étaient nourris sur une période de 10 semaines, avec au choix 4 aliments contenant une forte proportion (25 à 40%) de l'un des quatre fourrages suivants : Caragana microphylla, clou de girofle, tige de haricot et coque d'arachide. Les résultats de cette expérience montrent que les différents fourrages grossiers n'ont aucune influence significative sur la longueur des villosités de l'intestin grêle de toutes les parties, mais ont une influence significative sur la profondeur des cryptes. Ainsi, Caragana microphylla pourrait augmenter la profondeur du duodénum et du jéjunum et affecter la fonction de sécrétion de l'intestin grêle. Des résultats de performances zootechniques seraient utiles pour confirmer l'importance de la qualité physique des matières premières, voire des aliments.

 

4 - STRATEGIE D'ALIMENTATION ET CONDUITE D'ELEVAGE
  L'équipe Tchèque de Tumova et Volek a présenté une étude (divisée en 2 comm.) analysant les effets d'une restriction courte (1 semaine, 32-39 jours d'âge) et intense (46% ou 60% de l'ingéré libre) sur divers paramètres. Nous retenons ici les effets sur la morphologie intestinale (p 331) et les performances de lapins sevrés à 25 jours d'âge. Le poids vif final (81 jours d'âge) et l'indice de consommation alimentaire ne sont pas affectés par cette stratégie de restriction. Le développement des reins, du cœur ou des poumons ne diffère pas entre les 3 lots, alors que le poids relatif du foie est réduit de moitié par la restriction (P< 0,001). Une "fois" de plus, cela confirme l'impact de la restriction sur le développement du foie.

Sur cet organe, Lu et al. (p431) ont mesuré les variations d'hormones et celles de paramètres sériques de lapins (sevrés à 40j), en relation avec une semaine de restriction (40-47j.) à 30%, 50% ou 70% de l'ingéré libre (témoin). L'effet favorable, classique, de la restriction sur l'indice de consommation est retrouvé. A la fin de la semaine de restriction, on constate une hausse de 15 à 20% de la concentration sérique en protéines totales, sans variation des autres métabolites sanguins (triglycérides, azote uréique, etc.). En revanche, on observe une baisse de 2 hormones dans le foie, hormone de croissance (GH) et IGF-1 (insulin-like growth factor-1 ou somatomedine C): IGF-1 (-20%) et GH (-10%) (P <0,05). A la fin de l'essai (4 semaines après), aucun effet de la restriction ne persiste sur les hormones ou les paramètres sanguins.

Les effets de la restriction (70% vs ad lib) ont aussi été analysés par Combes et al. (p373, INRA Toulouse), chez des lapins logés (28-64j) en condition d'hygiène normale ou dégradée (schéma 2x2, n=105/groupe), sur la maturation du microbiote et l'activité fermentaire caecale. L'hygiène dégradée était obtenue en ne nettoyant pas la salle d'élevage après la bande précédente de lapins. De plus, la réponse inflammatoire (haptoglobine) et immunitaire spécifique à l'ovalbumine (IgG anti-OVA) a été mesurée durant la croissance. L'effet favorable, classique, de la restriction sur l'indice de consommation est là aussi retrouvé. Chez le lapin, le modèle "hygiène dégradée", mis au point antérieurement chez le porc, ne fonctionne pas comme attendu, puisqu'on observe une légère baisse de l'ingestion (-3,5%), mais sans affecter la croissance, d'où une meilleure conversion alimentaire entre 42 et 64 jours. La mortalité est réduite entre 28 et 40 jours chez les lapins restreints (5 vs 13 morts/210), tandis que l'hygiène dégradées réduit la morbidité (7,8% vs 16,6% p <0,01) sans affecter la mortalité. L'activité fermentaire caecale est stimulée (+10%) chez les lapins restreints. Les réponses inflammatoires et immunitaires anti-OVA ont été peu affectées par l'hygiène de logement, en revanche la restriction pourrait limiter la production d'IgG anti-OVA. Le modèle de dégradation de l'hygiène devrait être plus intense pour produire des effets visibles sur la physiologie ou les performances.

 


Les 3 aliments expérimentaux
et les périodes d’utilisation

La maturation du microbiote du lapereau a été étudiée en relation avec le choix des aliments pré-sevrage (Read et al., p.443; INRA Toulouse). Trois aliments expérimentaux sont comparés (cf. ci-contre) avec 3 groupes de portées (n=56 au total) sevrées à 35j.

Les lapereaux du groupe RL sont nourris avec l'aliment R de 18 à 28j puis avec l'aliment L de 28 à 49j), ceux du groupe LL sont nourris seulement avec l'aliment L, et HH avec H de 18 à 49j. Un plan de restriction est établi à partir du sevrage.
L'ingestion précoce (18-28j) d'aliment est 20% plus élevée chez les lapereaux ayant le même aliment que leur mère (groupe RL). Dans la semaine qui suit, on n'observe pas d'écarts d'ingestion entre les groupes. La croissance des 3 groupes est similaire jusqu'au sevrage. Puis à 42j le groupe LL présente un poids 7% plus bas que RL et HH (1064g vs 1130g), il en est de même à 49j. La mortalité est globalement faible et donc aucun effet des traitements n'est détectable.

Le microbiote caecal a été analysé par des techniques moléculaires (séquençage de l'ARN16S). Dans l'ensemble des échantillons, 5 phyla sont identifiés, avec 99.4% des séquences qui correspondent à seulement 2 phylas: Firmicutes 83.1% et Bacteroidetes 16.3%.
Au début de l'ingestion d'aliment solide (18j) jusqu'à 28j, le microbiote caecal est très similaire pour les 3 groupes, puis les écarts entre groupe s'accroissent. La variabilité intragroupe des microbiotes est plus élevée dans le groupe LL à 28 jours. Entre 43 et 49j, la variabilité de la composition du microbiote est plus faible dans le groupe RL que pour LL. Cela suggère qu'une plus forte ingestion d'aliment solide dès 18j, permet une stabilité de l'écosystème digestif plus précoce.

 

La communication de Pan et al. (p319) s'intéresse aux conditions d'éclairement durant l'élevage en relation avec la santé et le bien-être, avec un objectif final d'améliorer les conditions d'ambiance lumineuse pour la production. Les résultats portent sur l'effet de différentes longueurs d'onde de lumière sur la croissance du lapin et l'expression de l'ARNm la calbindine-D28K (CaBP-D28K) dans l'intestin grêle. Quatre-vingt lapins (1486g de PV) ont été divisés en 4 groupes: groupe R (lumière rouge/ Lum.=14h/ 60lux), G (lumière verte / Lum.=14h / 60lx), groupe D (obscurité permanente) et groupe témoin (photopériode naturelle). Après 6 semaines, le groupe D présente une plus faible (-20%) expression de l'ARNm de CaBPD28K, qui pourrait être en lien avec le métabolisme calcique (via la vitamine D3). De même, la croissance du groupe D est 25% inférieure aux 3 autres Il est reconnu comme nécessaire le recours à la lumière en maternité, notamment sur les performances de reproduction. Cette étude démontre l'intérêt de l'éclairage (couleur ?) sur les performances d'engraissement, intérêt qu'il faudrait étudier en foction du coût énergétique que cela engendre.

 

5 - MATIERES PREMIERES ET PHYSIOLOGIE
 

Deux études sont rapportées dans cette section : une portant sur les effets du tourteau de noix de karité, l'autre sur la pulpe d'agrumes.
Le tourteau de noix de karité (SNM pour Shea Nut Meal) est le sous produit de l'extraction du beurre de Karité (Shea nut = noix de Karité). Ce tourteau contient des composés phénoliques, des tanins, des saponines ainsi que des alcaloïdes (théobromine) qui le rend très amer, désagréable et irrite le tractus digestif des animaux. Pour réduire la quantité de facteurs "toxiques", on détoxifie la farine de karité (ébullition, fermentation). Comme le noyer de karité pousse facilement au Nigéria, le tourteau est très disponible, mais souvent jeté. Idahor et al. (p.411) se proposent d'étudier ce tourteau pour l'alimentation du lapin et sa physiologie. Cinq groupes de 12 lapins ont été nourris pendant 8 semaines avec 5 aliments composés (granulés?, MAT= 16% et CB=11,5% en moyenne) contenants : D1=témoin sans SNM, D2: 2,0% de SNM, D3: 4,0%; D4=6,0%; D5=8,0%. Le SNM utilisé est très pauvre en protéines (MAT = 1.6% MS), et en fibres (7% de CB sur sec), très riche en matières grasses (60%) et en minéraux (20%). L'ingestion ou la croissance n'est pas modifiée par l'incorporation de SNM, mais trop peu de lapins sont étudiés. Plusieurs paramètres sanguins sont légèrement modifiés, mais sans corrélation avec le taux d'incorporation de SNM. On pourrait donc recommander l'incorporation de SNM jusqu'à 8% dans un aliment, sous peine de confirmer ces premiers résultats sur un bien plus grand nombre d'animaux.

 

 

Lu et al. (p.307) ont comparé la croissance et quelques paramètres sanguins chez 4 groupes de 48 lapins nourris de 42 à 70j avec 4 aliments composés, contenant 0% de pulpe de citrus (témoin), 7%, 14% et 21%. La pulpe était incorporée en remplacement de germes de maïs, de farine de soja et de maïs, ce qui induit des écarts non négligeables sur le profil nutritionnel des aliments, et nous amène donc à être très prudents sur les conclusions. L'inclusion de pulpe d'agrumes n'a pas modifié la croissance (35 g/j). Le ratio albumine:globuline et la calcémie sont plus élevés dans les groupes avec pulpes. En résumé, la pulpe d'agrumes pourrait être incorporée jusqu'à 20% dans l'aliment, sans perturber les paramètres de croissance. Les effets sur les paramètres sanguins sont à relier au niveau de calcium de la pulpe de Citrus, niveau qui dépend de son procédé d'obtention (attention au risque de déséquilibre du rapport phosphocalcique et aux conclusions trop hâtives).

 

6 - NUTRIMENTS ET PHYSIOLOGIE
  Trois études ont porté sur l'analyse de l'immunité en lien avec des apports en fibres digestibles, en arginine ou en vitamine B6.
Dans le cadre général de trouver des alternatives aux antibiothérapies post-sevrage, le rôle potentiellement favorable d'une ingestion précoce (avant sevrage) de fibres digestible, pour stimuler l'activité microbienne et l'immunité est l'objectif principal de l'étude de Jacquier et al. (p. 419, INRA Toulouse). D'autres résultats issus de cette étude ont déjà été publiés aux JRC en 2015. Ainsi, 30 femelles ont reçu un aliment standard et 15 femelles un aliment médicamenteux (coli/OTC). A 15j d'âge les portées (9 à 10 petits) issues des femelles "ATB" ont reçu un aliment "témoin" riche en fibres peu digestibles (ADF) et hémicelluloses (groupe C). Les autres portées issues des femelles "sans ATB" ont été divisées en 2 groupes : la moitié a reçu un aliment "témoin" médicamenteux (tia/apra) typique de ceux utilisés en cas d'EEL (groupe ATB), et l'autre moitié un aliment riche en fibres digestibles (groupe RFF). Les lapereaux sont nourris ad libitum dès 15j (sevrage à 28j) et jusqu'à 45j. L'expression de gènes (transcriptomique) relatifs à la réponse immunitaire est analysée à partir de prélèvements sanguins et d'iléon. Seuls 9 gènes sont différentiellement exprimés (DE) à 29 jours selon les régimes, alors qu'aucune différence n'est observée à 45 jours. En revanche, l'effet de l'âge sur l'expression des gènes est très marqué, et semble différente selon les régimes. Dans le sang entre 29 jours et 45 jours, le nombre de gènes DE est de 1657, 438 et 0 resp. pour les groupes C, RFF et AB. Dans l'iléon, le nombre de gènes DE était de 128 pour RFF de 73 pour C et 36 pour ATB.
Ces résultats préliminaires suggèrent que la maturation (évolution avec l'âge) de l'expression des gènes en lien avec l'immunité serait modifiée par l'alimentation, avec un effet favorable au niveau iléal pour les lapereaux nourris avec le régime riche en fibres digestibles. A l'opposé, les lapereaux recevant l'aliment médicamenteux auraient une moindre expression génétique. Ainsi, un aliment enrichi en fibres digestibles pourrait stabiliser plus rapidement l'expression génique liée à l'immunité.

Pour étudier l'impact d'un ajout d'arginine sur la réponse lymphocytaire, Qin et al. (p. 323) ont comparé 3 groupes de 18 lapins de 49j, nourris pendant 42j avec soit: 0, 2 ou 4 g d'arginine ajoutée/ kg de MS dans un régime qui en contenait déjà 10 g/kg. La réponse lymphocytaire a été analysée au travers de l'expression de l'ARNm de facteur de stimulation des colonies de granulocytes-macrophages (GM-CSF) dans le jéjunum. L'ajout d'arginine a favorisé la croissance (16,2 vs 18,6 vs 21,1 g/j resp. pour 0, 2 ou 4 g/kg d'arginine) mais n'a pas d'effet sur GM-CSF. Rappelons que l'arginine fait partie intégrante des recommandations en acides aminés, et que ses apports se font en totalité par les matières premières puisque le coût de l'arginine synthétique est très élevé (relativement à la lysine à la méthionine ou à la thréonine).

Liu et al. (p. 299) ont évalué les effets de la vitamine B6 alimentaire sur quelques paramètres physiologiques liés à l'immunité. Cinq groupes (n=40) ont été nourris, avec 5 niveaux de supplémentation en vitamine B6 (0 "témoin", 5, 10, 20 et 40 mg/kg), du sevrage (30j) à 90j. L'apport de vitamine B6 affecte peu le poids du thymus ou de la rate, et reste sans effet sur les IgG sériques ou les IgE. En revanche, l'apport d'un supplément de vitamine B6 améliore sensiblement les taux sériques d'interleukine-6 et d'interféron-?, ainsi que dans le duodénum et l'iléon. Les taux d'expression de l'ARNm de l'IL-6 splénique et de l'IFN-? augmentent avec le niveau de vitamine B6 (P <0,01). Globalement, l'ajout de vitamine B6 (déjà fournie en grande partie par la caecotrophie) pourrait favoriser la réponse immunitaire non spécifique. L'augmentation de vitamine B6 pour des lapins en croissance, élevés en conditions intensive peut être une piste intéressante, mais des études complémentaires sont nécessaires pour confirmer l'effet sur la croissance et la santé.

 

7- CONCLUSIONS
  En conclusion, la section physiologie est moins riche en communications et en enseignements que dans les congrès précédents. Du point de vue des méthodes, on note une augmentation de l'usage d'outils moléculaires et en particulier pour analyser l'expression de gênes en lien avec diverses fonctions physiologiques, l'immunité ayant la priorité. Quelques résultats originaux ont contribué à améliorer nos connaissances sur le microbiote et les effets de diverses stratégies d'alimentation. Les résultats sont souvent "préliminaires" et pour certaines études mériteraient d'être confirmés.